
Mesurer et réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) est devenu un enjeu central pour toutes les organisations, qu’elles soient publiques, privées ou associatives. Dans ce contexte, le GHG Protocol (Greenhouse Gas Protocol) est reconnu comme la norme internationale de référence pour comptabiliser et gérer l’empreinte carbone.
Adopté par des milliers d’entreprises dans le monde, il offre un cadre clair, méthodique et transparent pour identifier les sources d’émissions, évaluer leur impact et planifier des actions concrètes de réduction. Cet article vous explique en détail ce qu’est le GHG Protocol, comment il fonctionne et pourquoi il est un outil stratégique incontournable pour piloter la transition carbone.
Pourquoi ce protocole a-t-il été créé ?
Objectifs principaux du GHG Protocol :
- Établir des standards internationaux pour le calcul et le reporting des émissions.
- Permettre un inventaire juste et fiable des émissions de GES.
- Simplifier et réduire le coût de la réalisation d’un bilan.
- Fournir des outils stratégiques pour gérer et réduire les émissions de manière efficace.
- Faciliter la participation à des dispositifs GES, qu’ils soient volontaires ou contraignants.
- Renforcer la transparence et la crédibilité des bilans des entreprises.
Le GHG Protocol : définition et historique
Le GHG Protocol a été développé conjointement par le World Resources Institute (WRI) et le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD) au début des années 2000. Il s’agissait de créer un référentiel commun, à la fois rigoureux et adaptable, pour aider les organisations à mesurer leurs émissions de GES et à communiquer de manière crédible avec leurs parties prenantes.
Les GES concernés par le GHG Protocol
Dès sa première édition, le GHG Protocol a intégré la comptabilisation et la déclaration des six gaz à effet de serre couverts par le Protocole de Kyoto.
- Dioxyde de carbone (CO₂).
- Méthane (CH₄).
- Protoxyde d’azote (N₂O).
- Hydrofluorocarbures (HFCs).
- Perfluorocarbures (PFCs).
- Hexafluorure de soufre (SF₆).
Ces gaz n’ont pas tous le même impact sur le climat : on les exprime en équivalent CO₂ (CO₂e), grâce à leur potentiel de réchauffement global (PRG) sur 100 ans, mesuré par rapport au dioxyde de carbone.
Le Greenhouse Gas Protocol (GHG Protocol) intègre la comptabilisation et la déclaration de six gaz à effet de serre (GES) couverts par le Protocole de Kyoto :
Gaz à effet de serre | Abréviation | Origine principales | Potentiel de réchauffement global (PRG-sur 100 ans) |
Dioxyde de carbone | CO₂ | Combustion des énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole), procédés industriels, déforestation | 1 (gaz de référence) |
Méthane | CH4 | Agriculture (ruminants, rizières), déchets en décomposition, exploitation du gaz naturel et du pétrole | ≃ 28 à 30 fois plus puissant que le CO₂ |
Protoxyde d’azote | N2O | Agriculture (engrais azotés), procédés chimiques, traitement des eaux usées | ≃ 265 à 298 fois plus puissant que le CO₂ |
Hydrofluocarbures | HFC | Fluides frigorigènes, climatisation, aérosols, mousses isolantes | 100 à 12 000 fois plus puissants que le CO₂ selon le composé |
Perfluorocarbures | PFC | Industrie de l’aluminium, électronique, solvants | ≃ 6500 à 12 000 fois plus puissants que le CO₂ |
Hexafluorure de soufre | SF6 | Isolant électrique, industrie du magnésium et électronique | ≃ 23 500 fois plus puissant que le CO₂ |
Avant le GHG Protocol, chaque entreprise adoptait sa propre méthodologie, ce qui rendait les comparaisons et les évaluations très difficiles. La création de cette norme a donc permis de standardiser la comptabilité carbone, d’améliorer la transparence et de favoriser l’action collective contre le changement climatique.
Le GHG Protocol s’appuie sur cinq principes fondamentaux :
- Pertinence : inclure les émissions qui ont un impact significatif sur le climat et la stratégie de l’organisation.
- Exhaustivité : couvrir l’ensemble des sources d’émissions significatives.
- Transparence : documenter la méthodologie, les données utilisées et les hypothèses retenues.
- Exactitude : limiter les erreurs et incertitudes dans les calculs.
- Cohérence : permettre la comparaison des données dans le temps et entre les organisations.
Pour plus de détails sur le GHG Protocol, vous pouvez consulter le document officiel ici : ghgprotocol.org.
Les 3 scopes du GHG Protocol
L’un des concepts centraux du GHG Protocol est la classification des émissions en trois scopes, qui permet de structurer l’analyse et d’identifier les leviers de réduction les plus pertinents.
Scope 1 : les émissions directes
Le Scope 1 regroupe toutes les émissions directes générées par les activités de l’organisation. Il s’agit par exemple de :
- La combustion de carburants dans les chaudières ou véhicules de l’entreprise.
- Les émissions fugitives de gaz fluorés ou de réfrigérants.
- Les procédés industriels qui génèrent directement du CO₂ ou d’autres GES.
Ces émissions sont généralement les plus faciles à mesurer, car elles proviennent d’installations et d’équipements contrôlés directement par l’organisation.
Scope 2 : les émissions indirectes liées à l’énergie
Le Scope 2 correspond aux émissions indirectes issues de la production d’électricité, de chaleur ou de vapeur achetée par l’entreprise. Même si ces émissions ne se produisent pas physiquement sur le site, elles sont liées à la consommation énergétique.
Le GHG Protocol propose deux méthodes pour calculer le Scope 2 :
- Méthode location-based : en utilisant les facteurs d’émission liés à la production locale d’électricité.
- Méthode market-based : en tenant compte des contrats d’électricité verte ou des garanties d’origine.
Ces méthodes permettent de refléter au mieux la réalité des émissions et de renforcer la crédibilité du bilan carbone.
Scope 3 : les autres émissions indirectes
Le Scope 3 regroupe l’ensemble des émissions indirectes liées à la chaîne de valeur, en amont et en aval de l’activité de l’organisation. Il inclut, par exemple :
- Les achats de biens et services.
- Le transport des matières premières et des produits finis.
- Les déplacements professionnels et trajets domicile-travail.
- L’utilisation et la fin de vie des produits vendus.
Le Scope 3 est souvent le plus complexe à quantifier, mais il représente généralement la part la plus importante des émissions totales pour de nombreuses entreprises.
Méthodologie et postes d’émissions
Un bilan carbone selon le GHG Protocol suit une logique claire :
- Identifier les sources d’émissions.
Exemples : collaborateurs (trajets et missions), locaux (chauffage, climatisation), numérique (équipements, serveurs), fret, services, déchets ou investissements. - Collecter les données d’activité.
Consommation d’énergie, kilomètres parcourus, volumes de matières premières, données financières… La qualité de la collecte est déterminante. - Appliquer les bons facteurs d’émissions.
Ceux-ci proviennent de bases reconnues comme l’ADEME ou le DEFRA. Le choix du facteur doit être justifié et documenté. - Consolider et restituer les résultats.
L’analyse doit combiner données physiques et monétaires, intégrer les incertitudes et produire une restitution claire, adaptée aux parties prenantes.
Selon les cas, il est possible d’adopter une approche générique (moyennes sectorielles) ou une approche spécifique (données propres à l’organisation ou au produit). Dans la pratique, de nombreuses organisations adoptent une combinaison des deux : utiliser des facteurs génériques pour les activités peu significatives ou difficiles à mesurer, et des données spécifiques pour les postes majeurs d’émissions. Cette stratégie permet de concilier précision et efficacité dans le pilotage carbone.
Exemples d’utilisation combinée dans le calcul des émissions
- Transport et déplacements professionnels
– Approche générique : utiliser des facteurs moyens par type de transport (avion, train, voiture) pour les déplacements occasionnels ou imprévisibles.
– Approche spécifique : mesurer précisément les émissions des véhicules de la flotte de l’entreprise, avec les consommations réelles de carburant et les distances parcourues. - Énergie et consommation électrique
– Approche générique : appliquer un facteur moyen d’émission électrique par kWh pour des sites secondaires ou peu consommateurs.
– Approche spécifique : relever les consommations réelles et le mix énergétique de sites industriels ou de bureaux principaux pour un calcul plus exact. - Achats de matières premières ou de produits
– Approche générique : utiliser des facteurs sectoriels pour les produits standards (ex. papier, plastique, acier) pour lesquels l’empreinte carbone moyenne est connue.
– Approche spécifique : collecter les données fournisseurs et les émissions exactes des matériaux ou composants critiques pour la production. - Déchets et traitement des effluents
– Approche générique : appliquer des facteurs moyens par type de déchet (plastique, organique, carton) pour les petits volumes.
– Approche spécifique : mesurer directement les émissions générées par les installations de traitement des déchets ou les filières industrielles spécifiques.
Avantages et inconvénients du GHG Protocol
Avantages du GHG Protocol
Adopter le GHG Protocol présente de nombreux avantages :
- Norme internationale reconnue : crédibilité auprès des investisseurs, clients et régulateurs.
- Transparence et traçabilité : facilite la communication et la publication des résultats.
- Identification des leviers de réduction : cibler les actions les plus efficaces selon les scopes.
- Préparation aux réglementations futures : CSRD et reporting extra-financier.
Article à lire en complément : Entreprises : comment utiliser le reporting extra financier (et la CSRD) pour renforcer sa performance et sa crédibilité ?
Limites et précautions
Malgré ses atouts, le GHG Protocol présente certaines limites :
- Complexité pour le Scope 3, nécessitant la coopération avec fournisseurs et partenaires.
- Dépendance aux facteurs d’émission, parfois génériques.
- Collecte de données lourdes pour les organisations multi-sites.
Il est donc important de hiérarchiser les sources, utiliser des approximations prudentes et documenter les hypothèses pour rester fidèle aux principes du protocole.
Le GHG Protocol : un levier stratégique pour la transition carbone
Au-delà du simple calcul des émissions, le GHG Protocol transforme les données carbone en véritable outil de pilotage. Il permet d’identifier les postes d’émissions les plus significatifs, de fixer des objectifs de réduction réalistes et de suivre leur mise en œuvre.
Cette approche offre une transparence totale vis-à-vis des parties prenantes — investisseurs, clients et partenaires — renforçant ainsi la crédibilité et la confiance autour de votre engagement climat.
En intégrant le GHG Protocol dans votre stratégie, vous disposez d’un cadre fiable pour orienter vos décisions, améliorer vos performances environnementales et anticiper les exigences réglementaires, tout en contribuant concrètement à la transition vers une économie bas-carbone.
Se former avec l’Institut Supérieur de l’Environnement
Pour aller plus loin et acquérir les compétences nécessaires pour maîtriser le GHG Protocol et réaliser un bilan carbone complet, vous pouvez découvrir notre formation à distance sur l’empreinte carbone.
Cette formation vous permettra de :
- Comprendre et appliquer les 3 scopes du GHG Protocol.
- Identifier les leviers de réduction d’émissions prioritaires.
- Mettre en place une démarche carbone fiable et crédible, adaptée à votre organisation.
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Sources de l’article
- The Greenhouse Gas Protocol, Ghg protocol, PDF
- United Nations Climate Change, Kyoto Protocol – Targets for the first commitment period
- Ministère de la Transition Écologique, Méthode pour la réalisation des bilans d’émissions de gaz à effet de serre, PDF