La loi AGEC accélère la transition vers une économie circulaire. Elle impose aux entreprises de nouvelles obligations tout en ouvrant des perspectives d’innovation. Voici ce qu’il faut retenir pour anticiper ses impacts.
Qu’est-ce que la loi AGEC et quels sont ses objectifs ?
Présentation générale de la loi AGEC
La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), n°2020-105 et promulguée le 10 février 2020, constitue un tournant décisif pour l’environnement français. Avec ses 130 articles et plus de 80 décrets d’application, elle vise à transformer en profondeur notre modèle économique en luttant contre toutes les formes de gaspillage, depuis la production jusqu’à la gestion des déchets.
Objectifs stratégiques
L’objectif principal consiste à abandonner l’économie linéaire basée sur le principe « produire, consommer, jeter ». La nouvelle approche privilégie la préservation des ressources naturelles, de la biodiversité et du climat. Cette transformation vise à réduire significativement la production de déchets français : 4,8 millions de tonnes de plastique consommées annuellement, dont 43% pour les emballages, selon l’INRAE. Les consommateurs bénéficient d’une meilleure information tandis que les entreprises développent des produits durables.
Comprendre les cinq axes stratégiques de la loi AGEC
1 – Sortir du plastique jetable
L’objectif « zéro emballage plastique à usage unique » d’ici 2040 structure cette ambition. Pour la période 2021-2025, les objectifs étaient les suivants :
- Réduction de 20 % des emballages plastiques à usage unique, dont au moins la moitié obtenue par le recours au réemploi et à la réutilisation.
- Élimination des emballages en plastique à usage unique jugés inutiles, tels que les blisters plastiques autour des piles et des ampoules.
- Garantir le recyclage à 100 % des emballages en plastique à usage unique, en renforçant les infrastructures et les systèmes de collecte et de valorisation 5.
À la fin de 2025, des bilans intermédiaires ont été réalisés pour évaluer l’atteinte de ces objectifs. Les résultats ont montré des progrès significatifs, bien que certains défis demeurent pour atteindre les objectifs à long terme.
L’objectif final reste la fin de la mise sur le marché des emballages en plastique à usage unique d’ici 2040, avec des étapes progressives pour mesurer et encourager les avancées dans cette transition vers une économie circulaire plus durable.
2 – Information des consommateurs
Depuis 2022, le logo Triman informe les consommateurs sur la recyclabilité des produits, accompagné de la signalétique Info-tri précisant les modalités concrètes : bac de tri, déchèterie ou reprise en magasin.

L’harmonisation des couleurs de poubelles sur l’ensemble du territoire facilite le geste de tri et améliore l’efficacité globale du recyclage. Ces mesures permettent aux consommateurs de participer activement à l’économie circulaire et de mieux comprendre les enjeux environnementaux.
3 – Lutte contre le gaspillage
L’interdiction d’éliminer les invendus non alimentaires depuis 2022 privilégie le don aux associations et le recyclage. Les objectifs de réduction du gaspillage alimentaire, fixés à 50 % par rapport à 2015, s’échelonnent selon les secteurs.
Par exemple, la distribution alimentaire et la restauration collective doivent atteindre cet objectif d’ici 2025, tandis que la production agricole, la transformation agroalimentaire et la restauration commerciale disposent d’un délai plus long, jusqu’en 2030, pour adapter leurs pratiques et réduire leurs pertes alimentaires. Ces mesures visent à transformer les pratiques des entreprises et à limiter la production de déchets tout en favorisant le réemploi.
4 – Action contre l’obsolescence programmée
Depuis 2021, l’indice de réparabilité note sur 10 la facilité de réparation de neuf catégories d’équipements électroniques. Ce dispositif est progressivement complété depuis 2025 par l’indice de durabilité, qui évalue la longévité des produits. Ces outils permettent aux consommateurs de faire des choix éclairés et incitent les fabricants à concevoir des produits plus durables et facilement réparables.

5 – Amélioration de la production
L’extension du principe « pollueur-payeur » a créé de nouvelles filières de Responsabilité Élargie du Producteur (REP), engageant les fabricants sur l’ensemble du cycle de vie de leurs produits. Le système bonus-malus, basé sur les qualités environnementales, récompense la réparabilité, la recyclabilité et l’incorporation de matières recyclées, orientant progressivement l’industrie vers des pratiques plus responsables et durables.
Identifier les entreprises concernées par la loi AGEC
Secteurs directement impactés
Depuis 2021, la loi AGEC a élargi le champ de la Responsabilité Élargie du Producteur (REP) à de nouvelles filières. Les fabricants de produits du tabac doivent désormais financer la collecte des mégots, tandis que les secteurs des jouets, des articles de sport, du bricolage et du jardinage sont également concernés. Les produits de construction, les huiles minérales ou encore les véhicules à moteur sont intégrés au dispositif. Plus récemment, en 2024, ce sont les chewing-gums et les textiles sanitaires jetables (lingettes, couches, protections hygiéniques) qui sont venus compléter la liste. Enfin, depuis 2025, les emballages industriels et commerciaux sont eux aussi soumis à ces obligations, ce qui touche directement les grandes chaînes logistiques et la distribution B2B.
Restauration et distribution
Le secteur de la restauration rapide a dû revoir ses pratiques : depuis janvier 2023, la vaisselle réutilisable est obligatoire pour les repas consommés sur place. Des enseignes comme McDonald’s ou Burger King ont ainsi introduit des gobelets et contenants lavables. Du côté de la distribution, les grandes surfaces n’ont plus le droit de détruire leurs invendus non alimentaires (vêtements, jouets, électroménager), qui doivent être donnés ou recyclés. Autre évolution : les commerçants ont désormais l’obligation d’accepter les contenants réutilisables apportés par leurs clients, ce qui modifie en profondeur les habitudes de consommation.
Commande publique
Les administrations ne sont pas épargnées. L’État et les collectivités locales doivent intégrer des biens issus du réemploi ou fabriqués avec des matières recyclées dans leurs achats. Par exemple, les marchés publics de mobilier de bureau doivent désormais inclure une part de meubles reconditionnés. Pour les téléphones, un objectif de 20 % d’appareils reconditionnés est fixé d’ici 2030. Ces quotas stimulent la filière du réemploi et créent de nouveaux débouchés pour les entreprises spécialisées dans la réparation et la seconde vie des produits.
Mieux informer les consommateurs
Signalétique et traçabilité
La loi AGEC impose une information claire et accessible sur les modalités de tri des produits. La signalétique Info-tri précise, en fonction de chaque emballage ou objet, le geste à effectuer : dépôt en bac, en déchèterie ou reprise en magasin. Cette standardisation facilite le passage à l’acte et limite les erreurs de tri.
Besoin d’une solution concrète pour vos produits défectueux ou dont vous ne savez que faire ? Utilisez l’outil de l’Ademe pour obtenir la marche à suivre en un clic.
Professionnels, accédez aux ressources dédiées pour déployer l’Info-tri dans votre filière et informer clairement vos clients. Un dispositif pensé pour simplifier vos démarches tout en valorisant vos engagements.
Transparence sur la composition et la durabilité
L’application publique Scan4Chem permet aux consommateurs d’accéder à des informations détaillées sur la présence de substances préoccupantes, comme les perturbateurs endocriniens, dans certains produits. Par ailleurs, la mention obligatoire de la garantie légale de conformité sur les factures rappelle les droits des acheteurs et contribue à renforcer la confiance.
Harmonisation nationale du tri
L’uniformisation des couleurs de poubelles sur l’ensemble du territoire met fin aux disparités locales et simplifie le quotidien des citoyens. Cette harmonisation, associée aux nouvelles consignes, vise à améliorer significativement le taux de recyclage et à inscrire le tri dans les habitudes collectives.
Mettre en place des stratégies contre le gaspillage et pour le réemploi
Gestion des invendus non alimentaires
Depuis 2022, les entreprises ne peuvent plus éliminer leurs invendus non alimentaires : ces produits doivent être prioritairement donnés à des associations ou orientés vers le recyclage. Cette obligation, initialement appliquée aux filières couvertes par la REP, s’est étendue à tous les autres produits depuis fin 2023, incluant vêtements, jouets ou électroménager invendus.
Réduction du gaspillage alimentaire
La loi AGEC fixe un objectif ambitieux de réduction de 50 % du gaspillage alimentaire par rapport à 2015. Les secteurs de la distribution alimentaire et de la restauration collective doivent atteindre cet objectif d’ici 2025, tandis que la production agricole, la transformation agroalimentaire et la restauration commerciale disposent d’un délai jusqu’en 2030. Ces mesures incitent les entreprises à revoir leurs pratiques et à limiter les pertes tout en valorisant les produits excédentaires.
Encourager le réemploi et les pratiques durables
Les commerçants ont l’obligation d’accepter les contenants réutilisables apportés par les consommateurs, favorisant de nouveaux modes de consommation. L’arrêt progressif de l’impression systématique des tickets de caisse contribue également à réduire le gaspillage papier. Par ailleurs, des fonds spécifiques soutiennent le développement du réemploi et de l’économie sociale et solidaire, créant des opportunités pour des initiatives locales et responsables.
Produits durables et réparables
Pour renforcer la durabilité des produits, la loi AGEC impose depuis 2021 l’indice de réparabilité, évaluant sur 10 la facilité de réparation de neuf catégories d’équipements électriques et électroniques. Depuis 2025, cet outil est complété par un indice de durabilité pour guider les consommateurs vers des choix plus responsables. Les fabricants doivent fournir les pièces détachées sous 15 jours ouvrables et, lorsque possible, proposer des composants issus de l’économie circulaire.
Soutien à la réparation et protection des consommateurs
Le bonus réparation, en vigueur depuis 2022, incite les consommateurs à réparer leurs appareils auprès de réparateurs labellisés. La loi interdit également de restreindre la réparation par des mises à jour logicielles, protégeant ainsi le droit à réparer et encourageant une consommation plus durable.
Optimiser la gestion de la fin de vie des produits
Extension des filières REP
La loi AGEC renforce la responsabilité des producteurs sur l’ensemble du cycle de vie de leurs produits en élargissant les filières de Responsabilité Élargie du Producteur (REP). Depuis 2021, ce dispositif concerne les produits du tabac, les jouets, ainsi que les articles de sport, de loisirs, de bricolage et de jardinage.
En 2024, les chewing-gums et textiles sanitaires jetables rejoignent le dispositif, tandis que les emballages industriels et commerciaux sont intégrés depuis 2025. Cette extension incite les entreprises à concevoir des produits plus durables et à anticiper leur valorisation en fin de vie.
Système bonus-malus environnemental
Pour encourager les pratiques écoresponsables, un système financier bonus-malus valorise les produits selon leur réparabilité, recyclabilité, durabilité et incorporation de matières recyclées. Les industriels sont ainsi orientés vers des méthodes de production et de conception respectueuses de l’environnement.
Gestion des biodéchets
Depuis janvier 2024, le tri des biodéchets est obligatoire pour tous les professionnels et particuliers, conformément à la réglementation européenne. Cette mesure transforme la gestion des déchets organiques et favorise leur valorisation, contribuant à la réduction des impacts environnementaux et au développement de solutions de compostage ou de méthanisation.
Tirer parti des avantages économiques de la loi AGEC
Opportunités d’innovation
La loi AGEC encourage les entreprises à repenser leurs produits et leurs services pour répondre aux enjeux de durabilité. En concevant des emballages recyclables, des objets réparables ou des solutions de réemploi, les organisations se distinguent sur le marché et améliorent leur image de marque. Cette approche proactive attire les consommateurs sensibles aux questions environnementales et transforme le développement durable en véritable levier commercial. Les entreprises innovantes peuvent ainsi créer de nouvelles gammes de produits éco-conçus, renforcer la fidélité de leur clientèle et se positionner comme des acteurs responsables de l’économie circulaire.
Optimisation des coûts
L’adoption de pratiques circulaires permet également de réduire les coûts opérationnels. La réutilisation des matériaux, le recyclage des composants et la diminution des pertes alimentaires ou industrielles limitent les dépenses liées à l’achat de matières premières et à la gestion des déchets. La rationalisation des stocks, associée à une meilleure planification des approvisionnements, contribue à accroître l’efficacité économique tout en respectant les objectifs environnementaux. Dans ce contexte, la loi AGEC transforme ce qui pouvait être perçu comme une contrainte réglementaire en un avantage financier tangible.
Avantages fiscaux
Le don d’invendus à des associations bénéficie d’une déduction fiscale de 60 % de la valeur des produits offerts. Cette mesure rend le don plus attractif que la destruction des invendus, tout en soutenant des initiatives sociales et solidaires. Les entreprises peuvent ainsi combiner performance économique, responsabilité sociale et respect de la loi.
Contrôles et sanctions
La DGCCRF et les DREAL assurent le suivi de l’application de la loi AGEC. Les manquements peuvent entraîner des amendes allant jusqu’à 15 000 € pour les personnes morales et des astreintes journalières pouvant atteindre 1 500 €. Cette vigilance réglementaire incite les entreprises à anticiper les mesures et à intégrer les exigences de durabilité dans leurs stratégies opérationnelles et commerciales, limitant ainsi les risques tout en valorisant leurs efforts en matière de transition écologique.
En conclusion,
Pour les entreprises, anticiper la loi AGEC ne se limite pas à se conformer aux obligations légales : il s’agit également de saisir des opportunités pour innover, optimiser ses coûts et renforcer son image responsable. Pour accompagner cette transition, l’Institut Supérieur de l’Environnement (ISE) propose deux formations complémentaires, adaptées aux enjeux actuels des organisations :
Pour en savoir plus et vous inscrire, rendez-vous sur le site de l’ISE.
Sources et notes de références
[1] – Legifrance, Loi AGEC, LOI n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire
[2] – Ministère de la transition écologique, STRATÉGIE 3R (Réduction, Réemploi, Recyclage) pour les emballages en plastique à usage unique, Avril 2022
[3] – INRAE, En finir avec les idées reçues sur le plastique, 03 juillet 2023
[4] – Info.Gouv, Sortir du plastique jetable d’ici à 2040, 23 février 2022
[5] – Ministère de la Transition Écologique, Stratégie nationale pour la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique (Stratégie 3R) Présentation du bilan intermédiaire, juin 2025
[6] – Economie.gouv, Tout savoir sur l’indice de réparabilité – Economie.gouv
[7] Legifrance, Décret n° 2024-1166 du 5 décembre 2024 instituant la filière de responsabilité élargie des producteurs de textiles sanitaires à usage unique
[8] – Economie.gouv, Donner vos invendus non alimentaires : comment ça marche et quelles sont vos obligations ? 01 juillet 2025