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Alors que les jeunes s’intéressent de plus en plus à la finance durable, les formations demeurent peu nombreuses et reconnues par les entreprises. C’est le moment de faire bouger les lignes.

500 milliards de dollars. Voilà le montant des émissions vertes finançant des projets respectueux de l’environnement en 2022, selon le Climate Bonds Initiative. Il s’agit d’un doublement par rapport à 2019. Un témoignage de la vigueur du monde de la finance durable. Avec la montée en puissance de la taxonomie verte et le projet de future taxonomie sociale portée par l’Union européenne, les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) sont désormais incontournables pour les investisseurs et les entreprises. Ainsi, les trois quarts des entreprises de la Bourse de Paris ont mis en place un comité chargé de la RSE au sein de leur conseil d’administration, contre à peine la moitié en 2019. Pourtant, en matière de formation, les enjeux liés à la finance durable restent encore trop souvent tapis dans l’ombre. Seulement 5% des formations en finance intègrent les enjeux écologiques. Parfois, ce sont les étudiants qui doivent eux-mêmes créer des formations pour combler les failles de l’Enseignement Supérieur. Dès lors, comment mieux sensibiliser les futurs professionnels du secteur ? Comment faire en sorte d’ouvrir la finance durable au-delà du cercle des initiés ? Quel est le rôle et l’intérêt des entreprises en la matière ?

Une attente toujours plus forte de la part des étudiants…

D’ici 2025, les émissions d’obligations vertes devraient atteindre 5 000 milliards de dollars : un chiffre qui confirme les opportunités offertes par le secteur, mais aussi ses évolutions en termes de métiers et de compétences recherchées par les professionnels. Une mutation sur laquelle doivent capitaliser les jeunes passionnés par les enjeux de développement durable et les entreprises voulant s’attaquer à un marché porteur, fleurissant et, surtout, qui devrait se renforcer dans les années à venir.

Toutefois, l’émergence de ce marché implique la formation des professionnels de demain. D’autant que les enjeux liés à transition de notre modèle restent encore trop peu traités au sein des cursus traditionnels. 75 % des étudiants en finance réclament d’ailleurs une meilleure intégration des enjeux liés à la transition écologique. Il est donc temps de mieux prendre en compte ses enjeux pour offrir aux étudiants de nouveaux atouts. D’autant plus alors que 2023 constitue l’année européenne des compétences !

Dans ce cadre, le Gouvernement a toute sa part à prendre. Il souhaite faciliter l’inclusion de cours consacrés aux questions écologiques dans les différentes formations d’enseignement supérieur. Son objectif est de former 100% des étudiants de niveau bac+2, quel que soit leur cursus, d’ici à cinq ans. Un choix fort qui gagne d’abord à être mis en œuvre puis approfondi au cours des mois à venir.

 … complémentaire d’une prise de conscience nécessaire de la part des entreprises

Plus que jamais, la prise en compte des indicateurs ESG par l’entreprise fait figure de priorité pour les futurs cadres financiers. 79% des étudiants en finance font de la réduction de l’impact environnemental, la mission numéro prioritaire de leur prochaine entreprise. Leur adaptation fait donc figure de priorité pour attirer les talents de demain. En particulier lorsque l’on connait les difficultés en matière de recrutement dans le milieu de la finance. Selon une étude du cabinet Robert Half publiée en mai 2022, près d’un recrutement sur deux échoue. Le signe qu’entreprises et jeunes diplômés gagnent donc à faire chacun un pas vers l’autre pour s’assurer d’un recrutement de qualité.

Plus généralement, tous les acteurs de l’enseignement supérieur gagnent à se mobiliser. Le rapport publié par The Shift Project en décembre 2022, offre à ce titre plusieurs pistes d’évolution pour les différents acteurs : enseignants, pouvoirs publics, étudiants, entreprises. L’enjeu est clair : préparer les générations actuelles et prochaines aux évolutions de la finance sous l’effet des crises engendrées par l’urgence écologique.

Car aujourd’hui, les jeunes diplômés en développement durable se tournent davantage vers les entreprises qui valorisent leur cursus et répondent à leurs attentes. Le nombre d’offres d’emploi disponibles sur le marché du « vert » a d’ailleurs bondi de 25% en 2022. La tendance est amenée à se poursuivre, voire s’accentuer. Voici donc une belle opportunité sur laquelle l’ensemble des acteurs gagne à s’appuyer en favorisant la création de modules de formation au sujet de la finance durable.

 

Armand de Coussergues, président de l’Institut Supérieur de l’Environnement